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Comment parler environnement pour faire mouche?

19 avril 2024
Article Fantinesuret Donut Aplatie

C’est important d’expliquer à la population les gestes à réaliser pour tenter de sauver la planète. Mais parfois, le message passe mal ou n’est pas entendu. De quelle façon rendre les informations plus captivantes afin que tout le monde veuille s’y mettre? Des chercheurs de l’UNIL réfléchissent à la question, telle Fantine Surret, assistante diplômée au Laboratoire de psychologie sociale.

Peut-être as-tu déjà reçu sa visite dans ta classe? Peut-être as-tu déjà participé à l’un de ses ateliers? Peut-être même lui as-tu donné ton avis? Fantine Surret, doctorante à l’UNIL, se rend en effet dans les écoles vaudoises pour collecter des informations sur les adultes de demain… «J’effectue une thèse en psychologie sociale de l’environnement, explique-t-elle. Cela signifie que je m’intéresse aux comportements, aux croyances* et aux attitudes de personnes dans une société déterminée. Plus précisément, je fais de la recherche sur l’éducation à l’environnement, ce qui m’amène à étudier des élèves de 10 à 12 ans. Mon but est de trouver la meilleure manière de parler aux enfants des changements climatiques, de la perte de la biodiversité, du développement durable, etc. Je cherche des méthodes d’apprentissage qui puissent donner des compétences aux jeunes, et non pas seulement des connaissances en matière d’environnement.» Et pourquoi? Pour trouver le moyen de donner envie de préserver la planète naturellement, sans devoir y réfléchir.

Pexels Ekaterina Bolovtsova 5036790

« …comparés à des enfants qu’on a laissé s’organiser comme ils le voulaient, ils se comportaient plus de manière durable. L’apprentissage coopératif aide à donner du sens à ce qu’ils font.»

Fantine Surret

Les jeunes recyclent, mais…

L’un des résultats de ses recherches montre que parfois, c’est possible. Un exemple? Les enfants trient les déchets sans se poser de questions! Cela va de soi pour eux. «C’est rentré dans la norme de trier les déchets, souligne-t-elle. Ils connaissent aussi tous les écogestes par cœur (éteindre la lumière quand on sort, ne pas laisser couler l’eau quand on se brosse les dents, etc.). Le problème, c’est que l’éducation à l’environnement les ennuie. On ne leur parle que d’éléments très graves (la disparition des espèces, le réchauffement climatique, etc.), tout en leur demandant de prendre une douche plutôt qu’un bain ou de ne pas gaspiller leur nourriture. Ce côté moralisateur n’est pas adapté à leurs attentes. C’est pourquoi je réfléchis à d’autres solutions dans le cadre de mon travail.»

Fantine Surret a aussi constaté que les élèves qu’on a poussés à coopérer les uns avec les autres se sentaient plus efficaces. «Et comparés à des enfants qu’on a laissé s’organiser comme ils le voulaient, ils se comportaient plus de manière durable, ajoute la psychologue. L’apprentissage coopératif aide à donner du sens à ce qu’ils font.» Ainsi, les élèves sont sensibilisés à l’interdépendance: nous dépendons les uns des autres, comme dans la nature où chacun dépend d’autres espèces pour sa survie.

«Celles et ceux qui avaient le droit de communiquer réussissaient mieux à préserver les ressources que les autres. Plus le groupe était grand, plus c’était difficile d’y arriver. Et plus les enfants étaient âgés, mieux cela fonctionnait.»

Fantine Surret

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Plus forts ensemble

La collaboration entre les êtres humains peut provoquer un sentiment d’efficacité collective, c’est-à-dire à quel point on se sent capable de réaliser des choses utiles en appartenant à un groupe. «Cela permet aussi de ne pas se sentir bloqué et angoissé en restant seul, surtout chez les enfants, souligne Fantine Surret. A leur âge, ils ne peuvent pas décider où partir en vacances, s’ils voyageront en avion plutôt qu’en voiture, ce qu’ils mangeront. Ils n’ont pas non plus le droit de vote. Alors, avoir une certaine efficacité au niveau collectif, avec d’autres élèves, les fait se sentir moins impuissants.»

La chercheuse a par exemple proposé des exercices d’entretien des ressources aux enfants. Dans un lac, les élèves devaient pêcher suffisamment pour nourrir leurs familles tout en laissant assez de poissons dans l’eau pour qu’ils puissent se reproduire. Résultats: «Celles et ceux qui avaient le droit de communiquer réussissaient mieux à préserver les ressources que les autres. Plus le groupe était grand, plus c’était difficile d’y arriver. Et plus les enfants étaient âgés, mieux cela fonctionnait.»

Pexels Ekaterina Bolovtsova 5036781

«Les enfants qui sont beaucoup en contact avec la nature, en compagnie de leur famille ou avec l’école, sont plus soucieux de l’environnement. Ils se comportent mieux envers lui.»

Fantine Surret

Grandir à ses côtés pour mieux l’aider

Les adultes les plus respectueux de notre planète sont souvent ceux qui ont appris tôt à connaître sa faune et sa flore. «Les enfants qui sont beaucoup en contact avec la nature, en compagnie de leur famille ou avec l’école, sont plus soucieux de l’environnement, signale la doctorante de l’UNIL. Ils se comportent mieux envers lui.» Mais il y a environnement naturel et environnement naturel, précise-t-elle. Planter un arbre au milieu d’un espace en béton n’équivaut pas à aller suivre une leçon dans la forêt…

Devant tous les défis à relever, certaines sont motivées, certains s’en moquent, d’autres restent sans opinion. Tout le monde a donc une attitude soit positive, soit négative, soit neutre face à ces questions. On pourrait penser qu’une attitude positive pousse à avoir un bon comportement environnemental. Eh bien pas du tout, indique la chercheuse. «Il existe de gros écarts entre les attitudes et les comportements. Par exemple, quelqu’un qui aime la nature et habite la campagne va au travail en voiture, parce qu’il n’y a pas de transports publics dans son village. On doit prendre en compte le contexte, mais aussi la psychologie humaine…» Il nous reste encore du pain sur la planche…

* Le monde qui nous entoure est complexe. Pour le comprendre, chaque personne s’en fait une idée dans sa tête, une croyance, à partir de connaissances qu’elle partage avec d’autres. Dans nos sociétés, on oppose souvent science et croyance. Mais il n’est pas toujours facile de départager l’un de l’autre. 

Idées de réflexion :

Et toi, comment vis-tu les changements climatiques?

Et toi, quelles espèces as-tu peur de voir disparaître?

Et toi, que fais-tu de passionnant pour protéger la nature?

Article Fantinesuret Donut Carré

Le sais-tu?

As-tu déjà entendu parler du modèle du donut? C’est une économiste britannique, Kate Raworth, qui l’a mis au point. Il est formé de différentes limites de la planète (cercle extérieur) et de plusieurs seuils de droits et besoins essentiels (cercle intérieur). «L’idée est de réussir à répondre aux besoins de l’humanité tout en restant à l’intérieur des limites planétaires», explique Fantine Surret. Autrement dit, arriver à soigner la population, à l’éduquer, la nourrir, etc. et en même temps sauvegarder notre nature. «Aujourd’hui, aucun pays n’est capable de répondre aux deux, souligne la chercheuse de l’UNIL. Assurer au moins les besoins fondamentaux partout sur terre serait déjà un énorme progrès.»

Retrouvez cet article et bien d’autres dans le magazine jeunesse des Mystères Va Savoir n°3! Destiné à un lectorat de 8 à 12 ans, le magazine Va Savoir!, propose des articles et des interviews de chercheurs et chercheuses de l’UNIL, des jeux et des informations pour devenir incollable sur plein de sujets. Le magazine est disponible sur place durant la manifestation ou après via téléchargement sur notre site.

Autrice: Virginie Jobé-Truffer pour Va Savoir! n°3, parution en mai 2024.

Illustratice: Agathe Borin pour Va Savoir! n°3, parution en mai 2024.

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